Nous avions commenté il y a quelques mois la décision du Tribunal de grande instance de Paris du 29 janvier 2016, rendue dans une affaire opposant Aquarelle à Flora Jet (Réseau Fleuri) au sujet de photographies de fleurs et de bouquets mises en ligne sur internet (ici).

Le tribunal avait débouté Aquarelle de son action en contrefaçon de droit d’auteur et de son action sur le terrain de la concurrence parasitaire. Sur le premier chef, les photographies reprises avaient été jugées non protégeables car dénuées de partis pris esthétiques et de choix arbitraires. Sur le second chef, l’action n’avait pas prospéré en raison de l’absence de valeur économique intrinsèque des clichés, de leur banalité, et en l’absence de justificatifs d’investissements importants d’Aquarelle en matière photographique.

Aquarelle a interjeté appel du jugement et demandé son infirmation, mais uniquement en ce qu’il avait rejeté ses demandes fondées sur l’article 1382 du Code civil. Aquarelle a donc abandonné en appel ses prétentions au titre du droit d’auteur pour essayer de démontrer le comportement déloyal ou parasitaire de Flora Jet.

Dans son arrêt du 9 décembre 2016, après avoir rappelé les critères d’appréciation de la concurrence déloyale (1) et du parasitisme (2) et après avoir relevé qu’Aquarelle ne justifiait d’aucun élément permettant de connaître les conditions de réalisation des photographies litigieuses, ni ne produisait aucune information sur les investissements, qu’ils soient financiers ou intellectuels, qu’elle consacre précisément aux visuels concernés par le présent litige, la Cour d’appel (Pôle 5, ch. 2) a confirmé le jugement.

La cour reproche à Aquarelle de ne pas avoir démontré en quoi Flora Jet aurait capté ses investissements dans des circonstances déloyales sachant que le fait de faire l’économie des efforts qu’Aquarelle aurait déployés ne présente en soi aucun caractère déloyal.

La décision peut paraître sévère mais elle est révélatrice de la difficulté qui peut exister pour déterminer précisément ce qui caractérise la valeur ajoutée des services proposés par certains acteurs du e-commerce par rapport aux autres.

Par ailleurs, cette décision s’inscrit dans le courant jurisprudentiel dominant ces dernières années en matière de libre concurrence, de e-commerce et de promotion sur internet. Rappelons en effet que la Cour de justice de l’Union européenne estime qu’il n’est pas nécessairement fautif de se servir de la marque d’un concurrent pour se référencer de façon payante sur internet, ce qu’elle a justement précisé dans le domaine de la vente de fleurs, dans une affaire portant sur la marque INTERFLORA (commentée ici).

© [INSCRIPTA]

(1) « La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement copié sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à un exercice loyal et paisible du commerce, et […] l’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copiée ».

(2) « Le parasitisme économique se caractérise quant à lui par la circonstance selon laquelle une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, s’inspire ou copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements ».

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